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TU

Tu attends sans impatience que la nuit enveloppe la maison. Souffle les bougies. Diffuse un silence épais qui amortit les bruits. Tu sais le moment propice. Tu glisses hors de ton lit. Il craque à peine. Pieds nus sur le parquet. Tu ouvres doucement la porte de ta chambre. Avances le pied droit sur le dallage du couloir. Le contact est froid mais tu préfères sentir chaque dalle sous tes pieds nus. Surtout éviter la dalle descellée qui tinte sous les pas.

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La photo oubliée

Pendant de longues années, cette boîte en carton vert marbré, fermée par un ruban noir, demeura sur un coin de la cheminée. Je finis par l’oublier au fil des mois, par oublier pourquoi elle était posée là, presque tristement. Par la voir sans la voir. Une présence absente. La présence compacte d’une absente, Jeanne. Je n’avais jamais ouvert cette boîte depuis le départ de ma grand-mère, Jeanne. C’était son legs, son bric-à-brac, le chuchotement d’une voix familière et lointaine au creux de mon oreille ; un léger battement de cil, fermer les yeux sur les souvenirs qu’elle avait capturés pour moi, sa petite-fille Elsa. Elle avait écrit mon nom d’une main tremblotante sur une vieille étiquette jaunie, collée là, au centre de la boîte, très légèrement de travers. Et puis une date, juin 1985, quelques mois avant sa chute.

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A Francis & Mané

On ne compte plus les années

Les enfants sont grands

Les saisons se ressemblent, parfums d’été

Du bois à couper, des framboises à cueillir

Les arbres de Noël sont devenus géants

Les petits enfants n’en finissent pas de grandir

 

Bien sûr, Il y des petites rides au coin des yeux

Un dos un peu voûté, le genou se rebelle

Contre les années, il y a ceux et celles

Qui les ont quittés, photos, lettres à l’encre bleue

Ceux qui passent au loin, en hivers ou en été 

On ne compte plus les années

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Snow Storm

C’était un matin vif et glacé. Elisa, emmitouflée, les yeux à demi fermés, marchait en sautillant jusqu’à la gare, en respirant à petites bouffées pour empêcher le froid d’envahir ses poumons. Les rayons du jour qui s’annonçait diluaient lentement la nuit bleutée. 

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N’habite plus à l’adresse indiquée

Partir. Fermer la porte. Glisser les clefs dans la boîte aux lettres. Descendre la rue jusqu’au métro. Je ne peux me résoudre à quitter cet endroit, pourtant trop petit, bruyant, mal situé.

Mon pas résonne dans les pièces vides.

Je circule de pièces en pièces. Je revois ma première visite. Cette enfilade de pièces qui m’avaient semblées vastes. Mon imagination qui dessinait l’emplacement de chaque meuble, de chaque objet. Puis, le soir venu, mes trous de mémoire qui me faisait douter de l’emplacement d’une cheminée, d’une porte ou d’une fenêtre.

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L’absente en ré mineur

“Softly, in the dusk, a woman is singing to me;
Taking me back down the vista of years, till I see
A child sitting under the piano, in the boom of the tingling strings
And pressing the small, poised feet of a mother who smiles as she sings.”  D.H Lawrence, Piano (1, 1-4)

« Ben, Ben, réveille-toi…réveille-toi ». Emilie chantait doucement dans l’oreille de Ben, une main posée sur son ventre. Ben se retourna en grognant. C’était le milieu de la nuit, une nuit d’été moite et sans lune.

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Le Chevalier à Lunettes

Joseph est méconnaissable sous son armure étincelante de chevalier et cette idée l’enchante. Passer devant la maison de Mme Robert la voisine sans avoir besoin de dire bonjour. Descendre le petit chemin de l’école, d’un pas lourd, en faisant trembler la terre sous ses pieds tout en tenant fièrement Zénon en laisse. Il sent tous les regards braqués sur lui. Les femmes sur le pas de leurs portes, effrayées, rappellent leurs enfants et se calfeutrent à l’intérieur de leurs maisons en attendant que Joseph soit passé.

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Pèlerinage

L’avion atterrit au petit matin, par un jour de grand vent. Lors du décollage, sa voisine s’était présentée : « Samantha Brown, on m’appelle Sam » et lui avait demandé s’il venait pour affaires ou en vacances. Il avait murmuré pour toute réponse, sans la regarder : « Paul Lullies, je viens en pèlerinage ».

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Conte Bleu: Le Livre Magique

Ils sont là, bien rangés sur l’étagère de la chambre jaune. Il y en a de toutes les tailles, des petites des grands et longs, des feuillus et des tout minces et de toutes les couleurs, des rouges, des bleus, des verts ou des jaunes,  foisonnant de dessins colorés ou remplis de texte noir écrit serré. Hippolyte les aime tous, particulièrement depuis quelques mois, depuis qu’il sait lire, tout seul.

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