A Francis & Mané

On ne compte plus les années
Les enfants sont grands
Les saisons se ressemblent, parfums d’été
Du bois à couper, des framboises à cueillir
Les arbres de Noël sont devenus géants
Les petits enfants n’en finissent pas de grandir

Bien sûr, Il y des petites rides au coin des yeux
Un dos un peu voûté, le genou se rebelle
Contre les années, il y a ceux et celles
Qui les ont quittés, photos, lettres à l’encre bleue
Ceux qui passent au loin, en hivers ou en été 
On ne compte plus les années


Elle sait trouver les mots
Il sait parler aux oiseaux
Ils aiment leur horizon dessiné de montagnes
Il aime l’air iodé de sa plage aux grandes vagues
Elle aime visiter les cousins cousines
Il aime parler aux voisins voisines

On les cherche dans la grande maison

Qu’on appelle Chassolière ou Chevallon

On les trouve au potager ou au verger
Leurs tomates sont légendaires
Leurs paniers débordent de pomme de terres
De kiwis, groseilles à maquereaux importés
Ils laissent les abricots aux oiseaux,
Les pommes à croquer aux asticots
Le noyer a ployé sous les années


Leurs étagères regorgent de livres bruissants
Transmis, collectionnés,
aux reliures dorées
Gravures aux rouges profonds, papier calque légers
Formules mathématiques, croquis jaunissants

On ne compte plus les années
Trop de bougies à souffler
En hivers et en été
Les gâteaux marbrés
Miettes beurrées pour les mésanges
Une pensée pour les Archanges
Enfants, les Noëls aux oranges
On ne compte plus les années

Francis
Il y avait des plages au sable chaud et fin
Battues par les vagues ou nichée dans un recoin
De l’île aux hortensias roses, aux maisons de pierre
Des marées immenses qui recroquevillent la mer
Étire l’île, pêche aux couteaux, aux crabes bleus
Une sœur, une ferme, un lait crémeux

Mané
Des cousines parisiennes, des frères et sœurs aînées
Des montagnes enneigées, des feux de cheminées
Une mère toute menue à l’ombre immense
Des amies fidèles, rentrant dans la danse

On ne compte plus les belles années
 

Brigitte, Noël 2017